Lotissements : cahier des charges et règles d’urbanisme, une cohabitation difficile

Dans les lotissements, le cahier des charges organise les relations entre le lotisseur (professionnel qui découpe et aménage le terrain en plusieurs lots) et les colotis (propriétaires des terrains et membres du lotissement), ainsi que les relations entre les colotis eux-mêmes.

Ce cahier des charges contient deux types de dispositions :

Une partie réglementaire qui constitue un document d’urbanisme intégrant les règles d’urbanisme propres au lotissement ;
Une partie contractuelle, document de droit privé, régissant les rapports entre les colotis.

Ces dispositions sont soumises à des régimes juridiques distincts, qu’il est intéressant de détailler.

1. Dispositions réglementaires du cahier des charges du lotissement

Il s’agit de fixer, lors de la création du lotissement, les règles d’urbanisme applicables à celui-ci : ces dispositions s’apparentent à un plan local d’urbanisme, mais à une échelle restreinte. Nous y trouvons les dispositions générales, comme la division du terrain, mais aussi des règles sur les accès, le passage des réseaux, les limites séparatives ou bien encore les hauteurs ou les clôtures.

Ce règlement doit être compatible avec les règles d’urbanisme de la commune et être approuvé par l’autorité administrative.

Afin que ces règles d’urbanisme d’origine privée ne se pérennisent pas, la loi prévoit qu’elles cessent de s’appliquer à l’expiration d’un délai de dix ans à compter de la délivrance de l’autorisation de lotir dans les communes dotées d’un plan local d’urbanisme ou un document en tenant lieu, sauf opposition expresse des colotis (article L. 442-9 du Code de l’urbanisme).

Aucune règle de caducité automatique n’existe en revanche pour la partie contractuelle du cahier des charges.

2. Dispositions contractuelles du cahier des charges du lotissement

Le cahier des charges – dans son aspect contractuel – pourra par exemple (et indépendamment donc des règles d’urbanisme), réglementer l’usage des constructions (interdiction d’exercer telle ou telle activité), l’implantation ou la hauteur de celles-ci, ou bien encore imposer des coloris pour les extérieurs ou des normes d’entretien des espaces verts.

Ces normes contractuelles, qui s’entremêlent souvent avec les dispositions règlementaires du cahier du charges, sont applicables aux colotis sans limitation de durée. La Cour de cassation a en effet toujours maintenu le principe de l’opposabilité des stipulations contractuelles du cahier des charges aux colotis, même après l’expiration du délai de dix ans.

Aussi, les colotis sont ainsi fondés à exiger le respect des stipulations contractuelles du cahier des charges. Ils peuvent à ce titre solliciter la démolition d’un bâtiment édifié au mépris de ces règles, dans le cadre d’une action réelle soumise à la prescription trentenaire ou des dommages et intérêts dans le cadre d’une action personnelle dans un délai de cinq ans, si la violation de la règle leur a causé un préjudice personnel.

Récemment, la Cour de cassation a tempéré la portée des sanctions encourues, en introduisant un principe de proportionnalité pour apprécier la gravité de la violation des règles du lotissement : si la construction litigieuse est édifiée dans l’esprit du lotissement et n’occasionne aucune perte de vue ni aucun vis-à-vis pour les colotis, la démolition ne pourra être exigée : cette atteinte devant être sanctionnée par le versement de dommages et intérêts.

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